Des chemins parcourus

Quelques témoignages, histoires de vie et d’apprentissages…

Dallandyshe, 20 mai 2019

Un après-midi à TENAY,

C’était un mercredi, il faisait beau. Nous sommes allés à Tenay en bus. Il y avait des participants d’ATELEC et du centre social « Le lavoir ». Parmi nous, il y avait beaucoup d’enfants dont mon fils. Les enfants étaient très satisfaits et excités pendant le trajet, il y avait une atmosphère chaleureuse. Quand nous sommes arrivés à Tenay, tous les musisciens étaient là. Ils nous ont fait une surprise, ils ont tout de suite commencé à jouer pour nous à la sortie du bus. La musique était dynamique et quelques personnes ont dansé. Ensuite nous sommes tous rentrés à l’intérieur de la salle des fêtes. il y avait des ombres chinoises et la musique nous accompagnait toujours. Pour moi c’était la première fois que je voyais de tels instruments. Pendant le concert les enfants et les adultes ont joué des instruments et avec les marionnettes. Mon fils était tout content. Quand nous sommes rentrés à la maison il n’arrêtait pas de parler des musiciens et de leur musique; ça m’a fait du bien de participer à ce concert de l’arbre canapas. J’ai passé un merveilleux moment avec mon fils ce jour-là.

Takidine H, fils de Madame Fatima H.

Ma mère est arrivée en France courant décembre 2013, ne sachant ni lire, ni écrire. Ceci a rapidement bouleversé ma vie. J’ai dû quitter mon métier de militaire pour rester avec elle et m’occuper de ses démarches… tant administrativement, financièrement que médicalement… Jusqu’au jour où j’ai appris l’existence de l’association ATELETTRE via l’assistante sociale qui accompagnait ma mère et qui voulait absolument que je l’inscrive. De ma part, je ne vous le cache pas, je n’avais aucune motivation. J’ai fini par le faire sans aucune attente particulière. J’étais loin de me douter, qu’un jour, elle se débrouillerait toute seule, qu’elle irait chercher ses enfants en train à l’internat à Culoz, qu’elle participerait aux réunions d’accompagnement de ses enfants sans que je sois à coté pour jouer le rôle de traducteur. Elle prend le train toute seule pour aller au marché à Lyon ou le bus pour aller faire ses courses, se promener. Aujourd’hui, ce sont des choses acquises. Elle connait mieux que moi la ville d’Ambérieu et ses recoins.Tout cela grâce à ATELETTRE.

Aujourd’hui, elle continue son insertion, progressivement mais surement. J’ai confiance en son implication et sa motivation. Aujourd’hui, elle est satisfaite de ce qu’elle fait. Elle est fière d’elle. Elle l’affirme quand elle est avec ses enfants pour les encourager aussi à ne pas abandonner leurs études. « Je ne laisserai jamais tomber les cours à ATELETTRE. Je continuerai à y aller tant qu’il sera possible.»

Pour ma part, j’ai pu réaliser des projets d’avenir sans me soucier de son bien être en mon absence. Bientôt, je partirai à Paris suite à une mutation professionnelle et j’ai l’intime conviction que ma présence ne sera plus autant nécessaire qu’au début…mis à part le manque d’un enfant qui quitte le foyer familial pour prendre le large !

Alain a toujours travaillé manuellement, en apprenant « sur le tas » et en faisant des formations en interne. Dernièrement, il était tailleur de pierre et avait une équipe sous sa responsabilité. A 49 ans, il se retrouve au chômage et une polyarthrite l’oblige à se réorienter professionnellement. Il divorce également, et perd ainsi le soutien de sa femme par rapport à l’écrit.

« A l’école primaire, c’était difficile. J’ai suivi un parcours hôtelier mais j’ai vite décroché. Je n’ai jamais plus écrit depuis l’école. C’était ma femme qui gérait l’écrit. Pour lire, je n’arrive pas à « imprimer »  ce que je lis, je n’arrive pas à mémoriser. C’est gênant par rapport au regard des autres, la démarche de venir ici est difficile. Mon souci est de ne pas savoir écrire, ça désocialise.  Quand je vais quelque part et que je demande de remplir une fiche, je n’aime pas le regard des gens. Je veux avoir un écrit plus compréhensible pour le boulot, je me rends bien compte que tout se fait avec de l’écrit. Je ne peux pas me débrouiller avec un ordi. »

Alain est venu dans les ateliers ACC d’ATELEC pendant moins d’un an. Suffisamment pour reprendre confiance en lui, lui permettre de se réconcilier, un peu plus, avec l’écriture et la lecture, et entreprendre un CAP cuisine, malgré ses difficultés à l’écrit encore importantes et le regard des autres qui lui pèse toujours.

« Ça m’a permis de reprendre confiance en moi, de voir qu’on n’est pas tout seul dans ce cas. Il y a des choses qui me reviennent de mes années d’école, il y a certaines choses qui restent.  Pour remplir une fiche administrative, je suis toujours aussi mal à l’aise, je ne peux pas le faire devant quelqu’un. Je suis un peu plus sûr de moi, je suis un peu plus à l’aise avec certaines personnes qui savent que je viens ici.  Je me suis ouvert ici, c’est d’avoir découvert des gens, de discuter, c’est pour ça que je ne viens pas à reculons. »